Secret avocat–client : la Chambre commerciale réaffirme son caractère global.
Par un arrêt de principe du 8 octobre 2025, la Chambre commerciale rappelle avec force que le secret professionnel couvre l’ensemble de l’activité de l’avocat, qu’elle relève du conseil ou de la défense. Cette affirmation, conforme à l’article 66-5 de la loi du 31 décembre 1971, s’oppose directement à la ligne plus restrictive adoptée ces dernières années par la Chambre criminelle, qui tendait à cantonner le secret aux seuls échanges « en vue de l’exercice des droits de la défense ».
Dans l’affaire jugée, l’administration fiscale avait utilisé deux lettres émanant d’un avocat suisse. Pour la Cour de cassation, la cour d’appel aurait dû vérifier si ces documents entraient dans le champ du secret professionnel, c’est-à-dire s’ils provenaient réellement d’un avocat intervenant dans une mission de conseil ou de défense. À défaut d’une telle vérification préalable, l’arrêt est cassé : toute correspondance avocat–client, ainsi que ses annexes, est présumée confidentielle, et l’administration ne peut s’en prévaloir sans l’accord exprès du client.
Si la substitution de motifs demeure possible en matière fiscale — permettant de maintenir une imposition sur la base d’autres éléments réguliers (la seule utilisation d’un document couvert par le secret ne suffit pas à entraîner la décharge de l’imposition si d’autres éléments justifient la rectification) — l’arrêt clarifie un principe fondamental : la confidentialité des échanges avec l’avocat est générale et indivisible. Elle ne dépend ni de la matière, ni de l’orientation du dossier, et ne peut être fragmentée entre conseil et défense.
Cette position rejoint la jurisprudence historique des chambres civiles et commerciales, ainsi que les exigences européennes qui protègent aussi la consultation juridique. Elle est déterminante en matière économique et concurrentielle, où les avis d’avocats sont parfois saisis et utilisés dans le cadre d’enquêtes : sans secret robuste, le conseil préventif perd sa substance.
Reste à savoir si la Chambre criminelle harmonisera sa jurisprudence. L’unification apparaît non seulement souhaitable, mais nécessaire, tant au regard du texte de la loi que des exigences du droit européen.
(Com., 8 oct. 2025, n° 24-16.995)